CHENECEY BUILLON
Le village de Chenecey, avec ses grosses maisons accolées, est perpendiculaire à la Loue, sur la rive droite. Il occupe une dépression au pied de coteaux boisés à l’est de Quingey, à 350 mètres d’altitude. En remontant la rivière, trois autres groupes de maisons se sont installés vers la Loue : les anciennes forges de Chenecey, à 300 mètres d’altitude, l’ancienne abbaye de Buillon et les anciennes forges de Buillon, à la limite méridionale du territoire.Aujourd’hui un nouveau village occupe le plateau des Granges.
Grottes près du gouffre des Granges Mathieu et près de la faille aux Combes Leveuses. Ruines du château sur un promontoire, rive gauche, de la Loue, admirable point de vue dominant un méandre de la rivière.
voies de communication
Le C.D. 110, Rouhe – Le Comice, longe la Loue rive droite après la traversée du pont. Le C.D. 440 relie le plateau des Granges à Epeugney. Un chemin, au pieds d’un à-pic de 300 mètres, dessert l’ancienne abbaye de Buillon et les anciennes forges de Chenecey en direction du pont de Châtillon. Commune située à 11 km au nord-est de Quingey et à 15km au sud-ouest de Besançon.
Cadastre
Premier cadastre établi en 1825.Territoire communal de 1658 ha, dont 922 ha en forêt (1980).
Hameaux
Granges Mathieu , anciennes forges de Chenecey, Granges du Sapin, ancienne abbaye de Buillon,Moulin Lambert (les anciennes forges de Buillon n’existent plus depuis 1980).
Toponymie
1. Chanecey (1238), Chenecey (1402).
2. Charencey (1120-1200), Cheirencé (1262), Charencé (1286), Charencey-sur-Loue (1286).
Histoire
Situation administrative
Ancien Régime – Chenecey et Buillon, subdélégation de Quingey
Révolution – District de Quingey, canton de Rurey.
XIXè – XXè siècles – arrondissement de Besançon, canton de Quingey. Chenecey et buillon fusionnent par ordonnance royale du 30 janvier 1822.
Situation judicaire
Ancien Régime. – Présidial de Salins, bailliage de Quingey.
Dès le paléolithique, le porche et la grotte de Chenecey ont servi d’abri à l’homme. De l’outillage taillé et des ossements animaux y ont été retrouvés. Le premier village se situait sur la colline des Granges Mathieu et se nommait : Charencey-sur-Loue. Puis la colonisation d’un méandre rive droite de la Loue s’est faite par l’intermédiaire de l’abbaye cistercienne de Buillon.
Le château des Sires de Chenecey représente un refuge pour la population qui s’installe dans les environs : il défend en effet l’entrée du défilé, sur la rive gauche du grand méandre de la Loue, à la pointe de la presqu’île située en aval du village. Mais la date de cette installation reste inconnue : les textes du XIIIè siècle citent Charencey-sur-Loue et le Cartulaire des Salines cite Charencey en 1238. La modification du toponyme est une énigme que nous ne pouvons résoudre pour le moment, faute de donnée précises.
Les chartes de fondation de Buillon citent plusieurs nobles de Chenecey, mais il n’est pas possible , selon M. de Casteljau, de suivre la filiation des seigneurs de cette époque. La maison de Chay paraît y avoir possédé des droits.
Au XIIIè siècle, le château de Chenecey se dédouble : une forteresse appartient à la maison d’Andelot et l’autre à la maison d’Arguel. La suzeraineté revient à la maison de Vienne. Le château de Chenecey des Andelot échoit à Catherine de Joinville par contrat de mariage avec Jean de Vienne en 1279. Le fief Arguel-Chenecey appartient à Pierre d’Arguel de 1238 à 1291 . Jean d’Arguel lui succède jusqu’en 1300. Jacques d’Arguel et de Chenecey (1335-1352) et son neveu Jean sont les derniers sires de Chenecey : la branche s’éteint vers 1526.
Après l’extinction de la famille de Chenecey, le château appartient au Pillot de Besançon , famille commerçante concurrente des Jouffroy dès le XVè siècle. Le château, réparé en 1408-1409 sur mandement du prince d’Orange et de Jean de Fallerans, châtelain d’Arguel, est détruit en 1678. Il en subsiste des pans de murs cachés dans la végétation.
Le glorieux passé de Chenecey-Buillon n’est plus qu’un souvenir au XIXè siècle , époque à laquelle les deux communautés fusionnent enfin.
Comme dans toute les régions bisontine, les maquis de Salins et F.T.P. ont traversé Chenecey en 1944.
Economie – Société
Démographie historique
1614 : 67 feux – 1657 : 130 hab – 1688 : 15 feux, 83 hab – 1745 : 70 feux – 1790 : 401 hab – 1826 : 706 hab – 1851 : 911 hab – 1876 : 876 hab – 1901 : 655 hab – 1926 : 453 hab – 1954 : 401 hab – 1975 : 388 hab – 1982 : 462 hab.
Pertes subies au cours des dernières :
1914-1918 : 29
1939-1940 : 2
Familles existant au XVIIIè siècle (1750)
Bart, Bartelemy, Carrey, Chanut, Chevassus, Claire, Gaillard, Gautier, Lambert, Maire, Meneguin, Regnaud, Riffaud, Tisserand.
Célébrités
Tissot (James, Jacques, Joseph), né à Nantes le 15 octobre 1836, mort à Buillon le 8 août 1902,” peintre d’histoire, de genre, de paysages et de portraits, dessinateur, aquafortiste, élève de Lamotte et de Flandrin. Installé en Angleterre de 1871 aux années 1880, il part travailler 10 ans en Palestine : il en résulte 350 aquarelles sur le Nouveau Testament, exposés en 1895 ; publiées en deux volumes elles sont communément appelées ” la Bible de James Tissot“. Après la publication de l’ouvrage, James Tissot alla s’enfermer à l’abbaye de Buillon en vue d’une oeuvre semblable sur l’Ancien Testament. La mort ne lui permit pas de terminer son ouvrage”. Vaulgrenant (Albert Peting, Baron de), né à Chenecey Buillon en 1831, mort en 1920, général, fit parti de la maison militaire du maréchal Mac-Mahon.
Les terres asses du territoire communal servent à l’agriculture et à l’élevage. En 1688, le cheptel du village de compose de : 15 chevaux, 70 bêtes à cornes, 10 porcs et 20 bêtes à laine. Il s’accroît et compte 384 bêtes à cornes en 1773. A cette même date, les productions de céréales et de vin sont de 2.322 boisseaux de froment, 3.108 boisseaux d’orge, 240 boisseaux d’avoine et 1.239 boisseaux de menus grains, 66 arpents de vigne fournissent 4 muids de vin.
En 1844, le terroir est partagé entre 427 ha de terres labourables et 64 ha de prés(prés-bois et prés secs). Il y a encore 200 ha de vignes et la culture de la pomme de terre produit 2.000 décilitres de tubercules.
La rivière concentre l’activité industrielle. “Le martinet de Chenecey date peut-être du XVè siècle : les forges et le haut fourneau sont exploités en 1677 par la famille Ployer, originaire d’Allemagne, qui y établit en 1695 une fabrique de fer blanc. En 1713, l’usine semble en faillite ; il n’y a plus qu’un martinet en 1744, qui se maintient avec une production négligeable jusqu’à la Révolution (le haut fourneau est arrêté dès 1700).Une tréfilerie remplace l’usine en 1803,crée par Mouret de Battrans ; elle est agrandie en 1819 et 1827. En 1840, elle comprend un four à puddler, six feux d’affinerie, 8 fours à réverbère et produit 480 tonnes de fil de fer ; elle emploie 83 ouvriers.L’usine appartient à la Société des Forges de Franche-Comté dès la création de celle-ci est spécialisée à la fin du XIXè siècle dans la galvanisation du fil de fer”. Son activité cesse en 1949 : une centaine d’ouvriers sont alors employés. Quant au martinet de Buillon, appartenant à l’abbaye, il est signalé en activité en 1844 mais il cesse de fonctionner plus tôt que celui de Chenecey.
Les ouvriers-paysans de Chenecey-Buillon travaillaient aux forges. Les deux ensembles, Chenecey et Buillon, étaient reliés par une voie ferrée : les wagonnets, chargés de bobines de fer laminé, étaient tirés par des chevaux ou des boeufs. Les “bilettes” (pièces de fer de 30 kg) sont chauffées au charbon de bois puis étirées au laminoir. Le fil de fer obtenu est enroulé à chaud sur des bobines, travail commencé par des enfants et achevé par un système d’enroulement automatique. A Chenecey, les bobines de 25 à 30 kg sont mises dans des fours à recuire pour amollir le fil (ce sont des marmites couvertes et colmatées de terre glaise). Les clous et la ronce artificielle sont les deux principaux produits finis. Le travail a lieu de jour et de nuit, éclairant cette partie de la vallée de la Loue.
La polyculture vivrière, dont fait partie la vigne du coteau Roussilon, ne permet pas de garder les jeunes au pays : nombreux sont ceux qui s’engagent – se vendent comme disent les habitants – pour échapper à la misère en cette fin de XIXè siècle. Les marchands de bois des Granges ont une activité printanière particulière : ils font sécher l’écorce des arbres à l’ombre, la mettent en moule pour former des paquets de 15 kg et la vendent aux tanneries de Quingey. D’autres habitants vendent les quelques fagots qu’ils arrivent à confectionner : la forêt et la rivière fournissent de nombreux produits d’appoint.
Aujourd’hui , l’agriculture n’est représentée qu’au hameau des Granges. Les trois fromageries crées au XIXè siècle ne sont plus en activité : celle de Buillon a été fondée en 1840, celle de Chenecey en 1842 et celle des Granges Mathieu en 1845 ; un camion venant de Cléron effectue le ramassage du lait.
Les hameaux de Chenecey-Buillon sont devenus des groupes de résidences soit secondaires soit occupées par des gens travaillant à Besançon. Cette dispersion de l’habitat aggrave le problème de l’entretien des 22 km de chemins pour une commune au budget modeste.
Une activité a animé en 1974 les anciennes forges de Buillon : la pisciculture. Les bassins utilisaient l’ancien canal de l’usine ; mais le 26 Mars 1981, le barrage de retenue cède sur vingt mètres de large mettant en péril les six tonnes de truites contenues dans les bassins. L’activité, qui semblait reprendre en août 1981, est arrêtée.
Histoire religieuse
Situation ecclésiastique
Actuellement – Zone pastorale des Vallées, doyenné de Quingey, paroisse de Chenecey-Buillon, église sous le vocable de l’Exaltation de Sainte Croix
L’église paroissiale de Charencey est signalée en 1120 parmi les possessions confirmées à la Madeleine de Besançon. Sans doute très pauvre, elle n’apparaît plus dans les taxations pontificales du XIVè siècle. Cependant, en 1352, Jacques, sire de Chenecey, y élit sépulture. La paroisse de Chenecey comprenait plusieurs communautés sous l’Ancien Régime, en particulier celle de Charnay.
L’église actuelle de Chenecey est inspirée de Saint-Etienne de Besançon ; elle est flanquée de deux chapelles aux XVè-XVIè siècles ; elle fut transformée en clocher-porche lors de la reconstruction de la nef et d’un sanctuaire en 1734 ; le beffroi fut alors coiffé d’une toiture en pavillon. Le coeur, voûté en berceau brisé, dénote une influence bourguignonne. Le clocher est éclairé de baies et a des contreforts en équerre. La tour-chevet est précédée d’une travée carrée. Deux statuettes, l’une de saint Eloi en marbre, l’autre de sainte Catherine en pierre, ont été élevées au XVIè siècle. L’église fut agrandie en 1838 par l’architecte Vieille.
Le 250 ème anniversaire de la construction de l’église s’est fêté en septembre 1984.
Devant le clocher, une croix de pierre rappelle l’emplacement de l’ancien cimetière.
Mais l’institution religieuse la plus célèbre de la commune fut, bien sûr, l’abbaye cistercienne de Buillon. Filiale de Clairvaux, elle fut fondée en 1136 par l’archevêque Anséric et les seigneurs de Chenecey. Cette abbaye, très pauvre pour ses débuts, fut successivement dotée par les maisons nobles des environs. En 1252, Jean de Chalon fait une donation de l’usage de ses bois du Jura pour le repos de l’âme de sa femme, Elisabeth de Courtenay. L’abbaye était considérée comme une des plus pauvres de Comté de Bourgogne ; d’anciens titres la nomment ” Bullio pauper”. En 1395, Jaques de Saffloz, abbé de Buillon, et son monastère d’engagent à célébrer perpétuellement une messe du Saint- Esprit puis un anniversaire pour le duc Philippe de Hardi, à condition que celui-ci leur restitue la rente de 15 livres sur la saunerie, rente qu’ils tenaient de la libéralité de Richard de Montbéliard, seigneur d’Antigny et de Montrond.
L’église abbatiale, quant à elle, avait été édifiée selon un plan “bernardin”rectangulaire : nef de huit travées, transept avec des croisillons s’ouvrant chacun sur deux chapelles, choeur, elle est consacrée le 12 avril 1140 sous le titre de l’Annonciation puis sous le vocable de Notre Dameen 1147. Du bâtiment de 53 mètres sur 24 mètres, il ne reste que le pignon du chevet et les murs du choeur. Les premiers bâtiments conventuels s’élevèrent en bois ; ils furent reconstruits en pierre dès que les ressources des moines le permirent. Ils comprenaient tous les éléments nécessaires à la vie communautaire (réfectoire, dortoir, cloître…)
A la révolution, l’Abbaye possède 6.000 à 7.000 francs de revenus, mais le monastère n’est plus desservi que par trois moines au lieu de huit. Après la suppression de l’abbaye, en 1790, les bâtiments sont vendus comme biens du clergé. Les ruines qui en subsistent aujourd’hui sont cachées par la maison Tissot, élevée au XIXe siècle.
Une épidémie de choléra ravage le village en août 1854. Un oratoire dédié à Notre-Dame de Salette est élevé en souvenir de sa protection, face au pont, sur la route de Charnay.
Premier maître d’école en 1641.
EQUIPEMENT
Réservoir aux Granges du Sapin, 1844. École de garçon au bord de la Loue, 1866. École de filles, Salle de Mairie et dépôt de pompes, 1890. Captage de la source Baccocier, source Tisserand, fontaines avec abris couverts, 1895. Captage de la source des Fournier, 1925. Corps de Sapeurs Pompiers au forges jusqu’en 1949. Fanfare l’Echo de la Loue, 1970. Adduction d’eau avec la source des Fournier, 1972. Terrain de motocross au Granges Sapin avec deux manifestations de niveau national, 1975. Lotissement communal les Foitey camping non aménagé au bord de la Loue, 1979. Le projet des années 1980 est l’aménagement touristique des grottes des Granges Mathieu.
Folklore
Deux légendes ont Chenecey pour cadre : le chasseur maudit (Gontrand de Chenecey, maudit par la Dame Verte pour avoir tué à la chasse une biche enchantée, perd son fils Thibaud et tous ses biens) ; le collier de perles ( les larmes de la Dame de Scey sont conservées dans un reliquaire de l’abbaye de Buillon).
En été, les habitants de Chenecey allaient couper des liens de noisetier ou de charmille dans la forêt au moyen de serpottes ; ces liens servaient à lier les gerbes moissonnées.
Les habitants sont dénommés les “Gremeci” ou ” Grebeusies” selon deux versions : sur ordre du châtelain, les “Gremeci” battaient la rivière pour faire taire les grenouilles (gremeci en patois). Les “Grebeusies” pêchaient les “grebeusses” ( les écrevisses en patois) dans le Loue.